Programme du Colloque



XVIIIème Colloque de l'Aidelf

Roger Cantacuzène Université des Antilles, France

Germanité et « semi-germanité » dans le récit familial martiniquais

Résumé:
L'enquête « Faire famille à la Martinique », qui repose sur quarante-cinq entretiens biographiques, a mis en évidence trois grands modes de constitution de la famille : « matrimonial », « conjugal » et « matriparental », selon le degré de formalisation des relations des parents et le type de ménage dans lequel les enfants viennent au monde. Mais, quels que soient les modes de construction familiale et les formes de parentalité qu'ils impliquent, la question de la semi-germanité traverse la très grande majorité des histoires de vie, que ce soit au niveau de la personne enquêtée, de ses parents ou de ses enfants, tissant entre les ménages un réseau de relations qui complexifie les configurations familiales. En raison de l'enfance partagée, les situations de semi-germanité utérine paraissent généralement assimilées aux relations de germanité. Il n'en va pas de même pour les situations de semi-germanité agnatique. Un grand nombre de ces dernières résultant de relations extra-conjugales et de liaisons parallèles, elles constituent souvent la face cachée, la part d'ombre et la marge incertaine, borderline, de la famille. A propos de cette question, négligée par la recherche sur la famille caribéenne, bien que son existence, admise ou réprouvée, soit culturellement reconnue, la communication proposée relèvera les différentes configurations de fratries complexes apparaissant dans les récits : semi-fratries agnatiques successives ou concomitantes, socialement reconnues ou inavouées, composées d'enfants légitimes et d'enfants dehors, ou d'enfants « illégitimes » de mères différentes - configurations pour lesquelles la catégorie de la « recomposition familiale » ne semble pas souvent pertinente. A partir des matériaux de cette enquête et d'autres enquêtes réalisées dans le cadre du Groupe « Genre et société aux Antilles », on s'interrogera aussi sur le « vécu » de cette relation : est-elle de notoriété publique ou « découverte », assimilée à une relation de « vraie » germanité ou rejetée ? Que met-elle en jeu, du point de vue social, matériel, successoral, affectif, pour le frère « légitime » et pour le frère dehors, pour les frères et sœurs « illégitimes » nés de mères différentes ? On s'intéressera également aux effets en retour de cette relation sur les ménages conjugaux, sur l'acceptation ou le refus par les conjointes des « demis » agnatiques de leurs enfants, sur leur éventuelle incorporation à la famille « légitime » - ou, au contraire, sur la séparation du couple qui résulte de leur existence. .

Le statut de l'enfant dans sa famille
jeudi 23 juin 2016