Programme du Colloque



XVIIIème Colloque de l'Aidelf

Tatiana Eremenko Ined, France

Grandir dans une famille d'origine immigrée

Résumé:
Les immigrés et leurs descendants constituent une part importante de la population dans de nombreux pays européens. Tandis que leurs comportements démographiques (formation des unions, fécondité) font l'objet d'un nombre croissant d'études, relativement peu d'analyses jusqu'à présent se sont intéressées aux conditions de vie des enfants issues de ces familles. Cette communication cherche à décrire les caractéristiques des familles d'origine immigrée et identifier le rôle joué par la migration sur ces dernières. Des structures familiales éloignées du modèle de la famille nucléaire (familles monoparentales ou recomposées, membres de familles non-cohabitants) s'observent-elles uniquement parmi les familles formées par les immigrés ou subsistent-elles au-delà également parmi les familles de descendants d'immigrés, ces résultats pouvant alors suggérer des rôles différents joués par la migration (effet perturbateur de la migration, effet de la socialisation, assimilation). Pour répondre à ces interrogations nous nous intéressons au contexte français, caractérisé à la fois par une histoire migratoire ancienne et une diversification croissante des flux en termes de pays d'origine. En 2011, 19,8% d'enfants de moins de 18 ans en France vivaient dans une famille immigré (INSEE). Si l'on adopte une définition plus large des familles d'origine immigrée en remontant sur deux générations, la proportion d'enfants issues de ces familles devient plus importante, surtout parmi les plus jeunes : parmi les enfants nés en 2006-2008, 25% avaient au moins un parent immigré et 15% avaient un parent descendant d'immigré (sans avoir de parent immigré) (Breuil-Genier & al. 2011). La combinaison des données du recensement de la population, de l'Enquête Famille et Logements (2011) et de l'Enquête Longitudinale des Enfants nés en France (2011) permet de dresser un profil exhaustif de ces familles, tout en se centrant sur celles avec des enfants en bas âge. On observe qu'il existe une hétérogénéité importante selon les origines géographiques quant aux configurations familiales des enfants. Alors que les enfants dans les familles immigrées vivent moins souvent avec un seul parent (14,6% versus 20,1% des enfants dans les familles non-immigrés), cette proportion peut atteindre plus de 30% parmi certaines origines (pays d'Afrique subsaharienne) (INSEE recensement de la population, exploitation de l'auteur). Les enfants dans les familles issues de cette région commencent à vivre avec un seul parent plus précocement (31% des mères n'habitaient pas avec le père au 2 mois de l'enfant, ELFE) et cette spécificité subsiste parmi les descendants d'immigrés (25% des descendantes d'immigrés d'Afrique subsaharienne étaient dans la même situation). Ces résultats suggèrent donc qu'au delà de l'effet direct de la migration pouvant conduire certaines familles à vivre à distance de manière temporaire ou permanente, ces configurations familiales sont plus stables et relèvent davantage des modèles familiaux distincts.

Grandir en millieu populaire : de l'enfance à l'orée de l'âge adulte
mercredi 22 juin 2016